Réduire le coût du logement, pour soi, pour tous

Des maisons dans la côte du quartier Battery à Saint-Jean, T.-N.-L.

J’ai écrit la première version de ce billet au début de 2020. Il s’est passé beaucoup de choses depuis, dont une pandémie et une grande fluctuation des taux d’intérêt. La crise du logement a continué de s’accentuer provoquant une hausse des prix tant pour l’achat que la location. Même si les solutions demeurent complexes, un regard minimaliste sur le sujet de réduire le coût du logement peut encore être utile. D’où une mise à jour de ce texte qui porte sur quelques éléments à considérer lors de l’achat d’une maison avec un bref détour par des enjeux de politique publique.

Commençons par des statistiques… maximalistes.

Musique à écouter pendant ou après la lecture de ce billet (il se peut que l’écoute simultanée ne soit pas possible) : Nostos  par Jean-Michel Blais (avec BUFFLO)

La taille des maisons unifamiliales

Au Canada, on construit des maisons de plus en plus grandes. Tel que l’explique l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) au sujet des données pour le Québec, les maisons unifamiliales construites entre 1961 et 1977 avaient une superficie de 112,8 m2 (excluant les sous-sols) alors que celles construites entre 2016 et 2020 avaient une superficie de 198,2 m2, soit une augmentation de 76%. 

Pendant ce temps, le nombre de personnes dans un ménage est passé d’environ 4 dans les années ’60 à 2,2 en 2020.

Donc, des ménages plus petits habitent des maisons plus grandes. 

Le Canada est ainsi, parmi les 38 membres de l’OCDE, le pays dont les maisons ont le plus grand nombre de pièces par habitant à 2,6. En France, les maisons ont 1,8 pièce par habitant et en Belgique 2,1. La moyenne de l’OCDE est 1,7. En d’autres mots, au Canada, une famille de quatre, propriétaire d’une maison, dispose en moyenne de 10 pièces alors qu’en France, elle en aurait 7.

De combien d’espace ai-je besoin?

Une première question minimaliste à se poser est : de quelle superficie de logement ai-je réellement besoin? En général, plus c’est grand, plus c’est cher. 

Non seulement le coût du logement sera moins élevé, mais vivre dans un espace moins grand peut signifier moins d’argent et de temps consacré à l’entretien. 

À l’inverse, comme la nature (humaine) a horreur du vide, un grand espace ne risque-t-il pas de se remplir de choses plus ou moins utiles?

Que puis-je me permettre?

Je reconnais qu’acheter une première maison est devenu plus difficile maintenant que lorsque Julie et moi avons acheté notre première – et seule – maison. Mais ce peut quand même être utile de souligner une approche minimaliste qui s’applique à tout achat de maison, que ce soit la première ou la dixième.

Ça commence par la question « Combien puis-je dépenser pour l’achat d’une maison? » Il existe de nombreux outils de calculs pour y répondre, mais rappelons-nous qu’ils suggèrent le maximum que l’on pourrait obtenir en hypothèque, et non ce qui est nécessairement notre meilleur choix. 

La pandémie de COVID-19 nous a rappelé l’importance d’avoir une marge de manœuvre dans nos finances et de se doter d’un fonds d’urgence. Les années suivantes ont ensuite révélé à bien des propriétaires que les taux d’intérêt peuvent monter. 

D’où l’importance de vivre en dessous de ses moyens. Et si tout va bien, cette marge de manœuvre pourra servir pour la retraite ou l’éducation des enfants. 

Dans un certain sens, Julie et moi avons été chanceux quand nous avons acheté notre maison : le taux de notre hypothèque était de 12%. Cela a limité la grandeur de notre maison et quand les taux ont baissé, nous avons maintenu nos paiements, accélérant ainsi l’acquittement de l’hypothèque.

De plus, comme nous le disons dans notre vidéo 5 stratégies pour aider financièrement ses enfants, il faut bien réfléchir aux conséquences de raccourcis tels qu’un prêt familial pour la mise de fonds.

Enfin, il ne faut pas être obsédé par l’idée de devoir posséder son logement. Je reviendrai sur ce point.

Un petit détour de politique publique

Être minimaliste, pour la plupart des gens, ne veut pas dire vivre coupé de la civilisation. On s’intéresse donc, du moins dans une démocratie, aux enjeux de politique publique. D’où ce détour avant de parler d’achat et de location.

Dans son édition du 18 janvier 2020, le magazine britannique The Economist se penchait sur le problème du coût du logement. Voici quelques faits saillants qui semblent toujours pertinents.

Le prix élevé du logement est évidemment une conséquence d’une trop grande demande pour l’offre. Mais cette offre pourrait être supérieure si, par exemple, des municipalités allégeaient certaines contraintes sur les nouvelles constructions. Ces contraintes sont souvent dues aux attentes et pressions des propriétaires; quand on possède une maison ou un condo, on souhaite qu’il monte en valeur et on dira peut-être alors « pas dans ma cour » quant à de nouveaux bâtiments.

Un article de 2024 de Radio-Canada illustre bien cette problématique. À Toronto, certains quartiers sont réservés aux maisons individuelles. Un cabinet d’architecte estime que Toronto pourrait accueillir 7,6 millions de nouveaux logements en optimisant l’espace. Dans ce domaine la différence entre Montréal et Toronto est souvent soulignée. Montréal et de nombreuses villes européennes ont des rues à usage mixte avec des commerces au rez-de-chaussée et des logements au-dessus. C’est plus rare à Toronto.

The Economist soulignait aussi que dans certaines villes, ce sont de bonnes idées du passé qui causent aujourd’hui des problèmes. Par exemple, les ceintures de verdure créent de plus longs déplacements entre le domicile et le travail, des coûts accrus pour établir le transport en commun, et un prix plus élevé pour habiter à l’intérieur de la ceinture. Dans d’autres régions, ce sont les nouvelles idées, comme le concept Airbnb, qui font monter les prix.

Citation : Réduire le coût du logement c’est aussi vivre dans un espace moins grand afin de consacrer moins d’argent et de temps à l’entretien. En arrière-plan, le quartier Battery à Saint-Jean, T.-N.-L.

Acheter ou louer?

Au milieu du 20siècle, plusieurs gouvernements ont adopté des politiques pour favoriser la propriété; pensons à l’absence d’impôt sur le gain en capital à la vente de son domicile. Ces politiques avaient pour but d’encourager une forme d’épargne pour la retraite et l’engagement des citoyens (l’électorat est heureux quand la valeur foncière grimpe). On dit même qu’être propriétaire de sa maison fait partie du « rêve américain ».

Mais, aujourd’hui, on se rend compte que ces politiques ont un coût; en plus de l’impact sur l’économie et l’environnement, cela augmente les tensions entre ceux qui peuvent vivre ce rêve et ceux qui ne le peuvent pas. 

Et est-ce vraiment nécessaire pour une démocratie solide? Il semble que non, car si aux États-Unis, au Canada et en Australie, environ 65% des ménages sont propriétaires, ce taux est de 40% en Suisse.

Avec ces politiques, on en est venu à prendre pour acquis que louer est comme jeter son argent par les fenêtres. Mais ce n’est pas toujours le cas.

D’abord, strictement sur le plan financier, il peut y avoir des situations ou louer et investir l’argent épargné, au lieu d’acheter une maison, peut rapporter autant sur le long terme. J’ai mis dans les ressources ci-dessous un lien vers un calculateur qui permet de faire la comparaison.

Un bémol cependant. L’auteur du livre Louer ou acheter, Stéphane Desjardins, dit que « La société de consommation est tellement forte que les pressions pour consommer font en sorte que même si tu payes moins cher pour te loger, la plupart des gens vont dépenser l’argent économisé au lieu de l’épargner et l’investir. Pour cette raison, l’achat d’une propriété est avantageux puisque c’est de l’épargne forcée. » 

Ses propos (lien ci-dessous) rejoignent donc un des objectifs des gouvernements mentionnés précédemment, l’épargne forcée. Mais pour les adeptes du minimalisme qui sont capables de résister aux pressions de consommation, l’épargne forcée est moins nécessaire pour atteindre une indépendance financière.

Je trouve très pertinente cette autre citation de Stéphane Desjardins : « Un loyer, c’est le maximum que ça va coûter pour vous loger. Mais une hypothèque, c’est le minimum que ça va coûter pour vous loger… Parce qu’il y a tellement d’autres frais qui viennent avec le statut de propriétaire, dont les gens ne tiennent pas compte. »

Enfin, outre les considérations financières, il y a les objectifs de vie. Combien de temps vais-je rester au même endroit? Vais-je fonder une famille? Ou les enfants vont-ils bientôt quitter? Il y a des jeunes qui préfèrent la location parce que ça leur procure de la flexibilité pour le voyage, le changement d’emploi ou même le nomadisme numérique.

Donc, quand on a le choix, ça peut valoir l’effort de considérer les nombreux facteurs en jeu avant de décider d’acheter ou de louer un logement.  

Que puis-je faire?

Je ne peux pas influencer directement la macro-économie du logement et je ne me vois pas déménager dans une micro-maison. Mais, je peux toujours réfléchir à nos besoins et notre futur, être conscient de notre chance d’avoir un toit au-dessus de notre tête, ne pas trop me plaindre des taxes foncières qui accompagnent le privilège d’être propriétaire, et accepter que, dans certains endroits, il faille construire plus d’habitations.

Ressources

Autorité des marchés financiers : est-il préférable d’acheter ou de louer? (calculateur)

La question à un million de dollars : vaut-il mieux louer ou acheter une propriété?

Quelques-unes de nos vidéos:

La vie en van : comment? Sophie qui montre l'intérieur de sa van à Julie.
La vie en van: pourquoi? Julie et Sophie en entrevue dans la van.
Annonce de la vidéo Notre fils est-il un nomade numérique?
Annonce de la vidéo 5 façons d'aider financièrement ses enfants

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